entrée de la mine en mai 2010

La mine de lignite de Vescagne

Historique

Au début du 19ème siècle, période durant laquelle les forêts ne fournissaient plus assez de bois, les premières exploitations minières de houille sont apparues dans les Alpes-Maritimes. Il y a eu des concessions à Gilette, Ascros, Carros,... délaissées à cause des difficultés d'exploitation mais celle de Vescagne, plus intéressante, a été la seule à connaître quelque prospérité. Au début du 20ème siècle, toutes les mines du département ont cessé leur activité.

Durant la période d'exploitation, au tout début du 20ème siècle, le lignite extrait à la mine de Vescagne, était transporté en charrettes jusqu'au train des Pignes à Vence. Il y avait sur la ligne du chemin de fer de Nice à Meyrargues un embranchement situé au Km 27,400 après le viaduc du Malvan. Voir détails ici.

Dans les années 1939-40 la mine de Vescagne a été remise en exploitation jusqu'en 1953. Cela assurait à la population locale, le combustible et les emplois qui faisaient défaut à la fin de la guerre.

Le gisement de Vescagne est situé à 8km au nord de Vence, au fond de la vallée de la Cagne sur la commune de Bézaudun-les-Alpes. Le minerai est du lignite, charbon pauvre saturé en soufre, et se trouve dans des formations du Trias supérieur (ère secondaire), dénommées Keuper, du nom de la région où on en a trouvé et exploité en Allemagne. Ce lignite dégage en brûlant des fumées contenant de l'acide sulfurique ce qui contribue à la constitution de pluies acides. On pense que le lignite extrait de la mine de Vescagne n'était pas utilisé pour le chauffage domestique. Voir ci-dessous dans le livre de Françoise et Caroline Chambon sur Bézaudun.

Dans la revue Technica, année 1943, numéro 46, il a été évoqué la possibilité de séparer le charbon, contenu dans le lignite, de la pyrite de fer qui contient le soufre pour le rendre meilleur combustible. Cette revue peut être consultée en ligne sur le site Internet de L'Ecole Centrale de Lyon. Les premières pages de cette revue, intitulées « Glanes à travers les revues techniques et scientifiques », sont consacrées à la mise en valeur du lignite. La mine de Vescagne est mentionnée plusieurs fois dans les pages 5, 6 et 7.

Plusieurs anciens de Saint-Jeannet se rappellent de la période d'exploitation durant les années 1939-1953. En particulier, ils se souviennent de la gare d'arrivée du téléphérique au bord de la route de Vence à Coursegoules. Sur ce site, il ne reste pratiquement aucun vestige: il reste trois poteaux en fer, coupés au ras du sol. Il semble que ce site a été recouvert par une décharge... A la mine, il y avait deux veines l'une se dirigeant vers Vence et l'autre vers Les Ferres. Celle de Vence a été exploitée mais c'est celle allant vers Les Ferres qui était la plus productive, elle n'a pas été exploitée. Il y a à proximité du village des Ferres un affleurement de lignite... Pour une personne, les mineurs venaient du Nord de la France et pour une autre personne, ils venaient d'Italie. Ceci est confirmé, au moins pour la période du début du 20éme siécle, par une lettre écrite en 1918, dont nous reproduisons des extraits ci-dessous. Il y avait aussi, bien entendu, des mineurs d'origine locale, comme indiqué dans le livre des Chambon.

A proximité du site, de l'autre côté de la Cagne, il y a un reste de construction en ruine qui contient des carcasses de lits pliant en fer. On peut supposer que cette construction servait de logement aux mineurs qui vivaient sur place durant la semaine. Sur la carte géologique de l'IGN, accessible sur le site de Geoportail, il y a, à peu près à l'endroit de l'entrée de la mine encore visible aujourd'hui, une indication lig. Sur cette même carte, il y a aussi une inscription « Mine abandonnée » au niveau de la passerelle en bois sur laquelle le GR51 franchit la Cagne...

Keuper: cette couche géologique du Trias supérieur est identifiée par la lettre t3-1 sur la carte géologique de la France au 1/80.000 sur la feuille numérotée 225 intitulée « NICE PONT ST-LOUIS ». Sur le flanc méridional du dôme de Barrot, le Keuper peut atteindre une épaisseur de 300 à 400 m. A Vescagne, au nord de Vence, il montre la coupe suivante du haut en bas : marnes noires alternant avec des dolimies, des marnes noires, rouges et vertes, un banc de dolomie, des marnes vertes et des pélites, puis des schistes à Equisetum (prêle) surmontant 2,5 m de houille, des grès et enfin du schiste, l'ensemble de ces couches qui ne représentent pas tout le Keuper atteignant 140 m. Les marnes sont des roches sédimentaires constituées d'un mélande de calcaire et d'argile. Ces différentes couches affleurent au fond de la vallée de la Cagne là où se trouve encore l'entrée de la mine de lignite.

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Demande de concession du 26 janvier 1831

Demande de concession en 1831

Périmètre de la concession demandée en 1831

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Accord de concession du 26 octobre 1832

La concession obtenue en 1832 par le sieur Suchet



Périmètre de la concession accordée en 1832

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Lettre du 15 juillet 1918

Nous avons reçu par mail de Monsieur Dominique Humbert, qui a été très intéressé par notre site, une information supplémentaire qui raconte l'activité d'un mineur en 1918. Voici son message :

Mon arrière-grand-père a participé en 1918 à la mise en exploitation de cette mine en tant que conduteur de travaux. Mon père a retrouvé une de ses lettres donnant des détails probablement inédits sur cette mine. Mon père a reçu cette lettre il y a de nombreuses années des mains d'un homme dont il n'a pas noté l'identité, probablement un héritier du Maurice à qui la lettre était destinée.
Pour vous situer brièvement le contexte, mon arrière-grand-père s'appelait Emile Tison (1871-1933). Fils de mineur, il a toujours vécu dans le Nord où il a été géomètre dans les mines, mis à part durant la guerre de 1914-18, où il s'est replié dans les zones non occupées, essentiellement dans le Pas-de-Calais. Voici les extraits de cette lettre concernant son activité à la mine de Vescagne :


Vescagne le 15 juillet 1918

[...]

Nous sommes arrivés moi et Croenne le 24 mars (1918) à Vescagne.

[...]

La mine de Vescagne que nous préparons pour l'exploitation est située dans une vallée dans laquelle coule une rivière désignée sous le nom de la Cagne entre Vence et Coursegoules (voir la carte A.M.). Cette rivière est une série de cascades variant de 1 à 30 m. L'été il y coule peu d'eau, mais pendant l'hiver et les saisons pluvieuses elle se transforme en torrent par suite de la grande quantité d'eau descendant les montagnes environnantes qui ont des altitudes de 900 à 1000 m. C'est charmant comme pays mais un peu désert. Les moyens de communication ne sont pas faciles: pour aller prendre le train il faut s'aligner de 12 à 15 kilomètres à dos de mulet dans des sentiers de chèvre creusés sur les accotements des montagnes. Ce moyen de locomotion vous abime un peu le derrière par suite des cahots causés par les montées et descentes qui varient de 10 à 20°. A certains moments on se figurerait être dans un treuil à berlines montantes et descendantes. Ces petits désagréments ne sont rien à côté de ceux [auxquels] nous aurions été exposés si l'on était resté à Bruay.

La mine où nous sommes est encore à l'état embryonnaire, nous devons tout créer. Recoupages et voies d'exploitation dans les affleurements, il ne nous faut pas de puits pour exploiter le gisement, chemin de fer, câble aérien, construction de logements pour nous et les ouvriers. Au point de vue habitation c'est vraiment rudimentaire: nous sommes installés dans un grand baraquement en bois composé de 4 pièces, 2 chambres à coucher, cuisine et salle à manger. Que voulez-vous, c'est la guerre et l'on est toujours mieux que dans les cagnas et abris de tranchées dans lesquels nos pauvres soldats vivent depuis près de 4 ans.

Croenne s'occupe tout spécialement du creusement des galeries. Moi je fais la rédaction des rapports, l'étude du gisement et recherches nécessaires pour l'agrandissement de cette concession.

J'ai établi un plan d'ensemble de la concession à l'échelle de 1/10 000 et des plans de détail pour l'exploitation, avec coupes verticales tous les 100 m à l'échelle du 1/1 000.

Je me suis occupé de l'étude du chemin de fer et vais commencer les travaux d'un câble aérien de 7 à 8 kilomètres pour le transport des charbons à une usine à briquettes dont on a commencé la construction.

J'ai établi les plans d'un grand bâtiment qui sera le siège des Mines de Vescagne.

Cette diversité de travail est très intéressante et me rappelle un peu mes occupations de Dechy où je ne faisais pas deux jours de suite la même chose. Lorsque l'on regarde en arrière, comme ces souvenirs vous semblent éloignés et confus, le voile du passé semble s'épaissir de plus en plus et on se demande si jamais il se déchirera.

Le gisement que nous exploitons est composé de deux couches d'une puissance moyenne de 2 m à 2,50 m pour chacune, son inclinaison est très variable de 70 à 80° pour se ramener à 20 ou 25°. Les terrains encaissants sont assez compacts quoiqu'ils ne valent pas à beaucoup près comme dureté les terrains encaissant les couches du Bassin houiller du Nord et Pas-de-Calais, mais enfin ça se tient et nous permettra une exploitation avec remblais complets.

La nature du combustible est l'intermédiaire entre la houille et le lignite. D'après des essais faits il y a quelque temps, voilà ce que nous avons trouvé:

Houille du Nord: 8000 calories

Charbon de Vescagne: 6300 calories

Lignite ordinaire: 4000 calories.

Les analyses que j'ai faites moi-même ont donné les résultats suivants:

Humidité: 12,7 %

M.V. (matière volatile) 32,9 %

Carbone fixe: 41,2 %

Cendres: 13,2 %

[...]

Ce charbon transformé en agglomérés, briquettes et boulets fera un combustible de premier choix pour le chauffage domestique. Au point de vue industriel sa teneur en matière volatile fait qu'on peut l'utiliser dans les usines à gaz.

Enfin l'affaire tout en étant petite n'est pas mauvaise et promet pour l'avenir.

[...]

Vous me demandez si quelquefois il y aurait quelque chose pour vous. Je ne vois rien ici car nous n'avons pas l'autorisation d'occuper des personnes encore astreintes au service militaire, et les ouvriers que nous avons sont des enfants de 16 à 18 ans et des ouvriers de 50 à 65 ans. Ce sont des Italiens et Piémontais pour la plupart et sont assez dociles.

Nous verrons pour l'avenir.

[...]

Emile Tison Conducteur de travaux

Mine de Vescagne par Coursegoules

Alpes Maritimes



Lisez l'original de cette lettre scannée et mise à notre disposition par son arrière petit-fils, Dominique Humbert.



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Vence

Deux pages extraites du livre de Anne Verots-Guilbaud : Vence au début du siècle 1900-1939

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Exploitation 1940-1953

Extraits du livre de Françoise et Caroline CHAMBON : Bezaudun-les-Alpes De mémoire d'hommes (2005), pages 114 et 115

Ces auteurs ont publié d'autres livres sur Saint-Jeannet. Vous pouvez trouver des informations ici.

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Etat en mai 2010

L'entrée de la mine, l'intérieur est effondré: l'entrée de la mine

Une des bennes qui servaient à remonter le minerai jusqu'à la route de Vence à Coursegoules par un téléphérique: Une benne

Les rails qui servaient à véhiculer les wagonnets de l'intérieur de la mine vers les bennes du téléphérique: Les rails qui servaient à véhiculer les wagonnets

Un ventilateur qui insuflait de l'air frais à l'intérieur de la mine tourne encore: Ventilateur

Les restes d' un moteur ou d' un générateur électrique: Les restes d' un moteur ou d' un générateur électrique

Un moteur thermique? Un moteur thermique?

Un treuil du téléphérique? un treuil du téléphérique?

Ce qu'il reste de la station d'arrivée du téléphérique au bord de la route de Vence à Coursegoules: Gare d'arrivée du téléphérique

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Visite en juin 2011

Balade à la mine de Vescagne par l'association « Sentiers et villages des Baous » de Saint-Jeannet.

Sourgentin N°203-OCTOBRE 2012

Ce magazinee du Pays niçois a publié, en octobre 2012, un numéro intitulé « Mines, grottes et souterrains ». Dans ce numéro un article, consacré à la Mine de Vescagne, apporte des informations complémentaires sur la remise en exploitation à la fin de la deuxième guerre mondiale. Dans cet article, notre page est citée et la photo de l'entrée de la mine sert d'illustration à un autre article.

Malheureusement le site Internet de cette revue n'a pas été mis à jour depuis juin 2012 et on n'y parle pas encore du N°203. Attention, pour accèder au contenu de ce site il faut cliquer sur le libellé suivant qui se trouve au milieu de l'écran :

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Cette revue peut encore étre trouvée en librairie. Pour notre part, nous l'avons trouvé chez Leclerc, place de Grand Jardin à Vence.

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Nice-Matin 23 août 2013

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